Super démocratie – le Sénat des Choses
Willi Filz a composé cette série quelque dix ans avant la guerre civile qui, depuis 2011, ravage la Syrie. Si l’artiste visait, à l’époque de sa réalisation, à y cerner l’humain dans la diversité, en dehors de tout jugement, et à prendre le portrait d’une société sans y apposer de propos politique, l’œuvre se charge aujourd’hui d’un poids supplémentaire. Le travail de Filz oscille entre engagement et retrait ; parfois cette ambivalence colle à son œuvre pour des raisons imprévues, comme dans le cas de cette série syrienne, parfois elle paraît provoquée par l’artiste lui-même. En effet, si ses séries photographiques présentent des inconnus, ceux-ci sont parfois choisis dans des lieux marqués symboliquement, comme la frontière migratoire au Maroc (dans la série Des hommes dans le Nulle Part). Le photographe, par l’image, traite d’une réalité problématique sans pour autant se positionner ouvertement à son sujet. Dans l’ambiguïté, une seule position transparaît avec clarté : un plaidoyer en faveur de l’humanité.
Filz décrit son travail comme « un exercice visuel ». L’« exercice » réside dans la quête d’une identité « authentique » qu’il faut saisir et, en même temps, dans la vigilance à ne pas imposer l’idée même d’identité aux femmes et hommes qu’il libère, à travers son objectif, d’un jugement péremptoire.